Gestion des stocks dans l’industrie du vélo : explications et projections

Après une très forte demande, l’industrie du vélo connaît depuis l’année dernière une période difficile avec problèmes de stocks et de trésorerie. Si les stocks ont toujours été problématiques pour la santé financière des entreprises du cycle, ils constituent leur principale préoccupation. Voici un décryptage de la situation économique du marché du cycle, qui a connu l’effet « coup de fouet » et qui en subi aujourd’hui les conséquences.

Quelles sont les causes des sur-stocks dans l’industrie du vélo ?

La question des stocks de composants et de bicyclettes assemblées a toujours été très sensible. À cette saisonnalité s’ajoutent de nouveaux facteurs aggravants qui affaiblissent la demande et font ainsi grimper les stocks, l’augmentation du prix et la rareté des composants, justifiées par diverses crises (conséquences du covid, guerre en Ukraine, etc.) Selon CONEBI, le prix de l’aluminium a augmenté de 100% depuis mars 2020. De même, les hausses de prix de l’acier (+50%), de la fibre de carbone (+30%), du caoutchouc (+70%) et du lithium (+400%) ont déjà eu leur impact sur les prix de détail (mi 2022). Si l’usage du vélo électrique progresse incontestablement, le contexte économique n’est pas toujours favorable aux achats de quelques milliers d’euros (inflation générale, crise énergétique). Ces variations du pouvoir d’achat des particuliers et de la capacité financière des entreprises (distributeurs…) ont un impact négatif sur les ventes, qui sont très volatiles.

L’industrie du cycle subit actuellement l’effet « coup de fouet », une théorie décrivant que de petites variations de la demande peuvent produire un effet de fouet en amont ! En effet, l’industrie est confrontée à une tempête due au boom des ventes induit par la pandémie, qui a entraîné des ruptures de chaînes d’approvisionnement et des pénuries, qui ont conduit à des commandes surdimensionnées par prudence, qui ont conduit à un ralentissement de la demande et à des stocks gonflés. Bien sûr, cela s’ajoute aux contraintes de la chaîne d’approvisionnement, déjà très fortes pour les composants critiques et les modèles haut de gamme populaires.

Bullwhip effet industrie vélo

Lorsque les détaillants ont vu la demande de vélos augmenter, ils ont commandé 25 % de stocks en plus que d’habitude. Lorsque les stocks ne sont pas arrivés à temps, ils ont commandé la même quantité à quelqu’un d’autre et ont commencé à accumuler les pièces qu’ils avaient. Les distributeurs ont pris cette commande de 50 % et ont ajouté leur propre augmentation de 10 %. Les marques ont fait de même, demandant aux usines de fabriquer 70 % de plus que ce dont elles auraient normalement eu besoin. Deux ans plus tard, le fouet finit par céder. Les pièces manquantes sont arrivées, les usines ont rattrapé les commandes en souffrance, les cargos ont pris la mer, les grèves portuaires ont pris fin. Maintenant, tous les stocks arrivent dans les entrepôts et les magasins, au moment même où la demande des consommateurs chute, où les discours sur la récession et l’inflation bloquent les portefeuilles, et où le marché des vélos d’occasion, notamment en ligne, déborde.

Quelques semaines avant l’Eurobike, Taïwan a connu une première vague d’annulations de commandes, suivie d’une très forte demande immédiatement après l’événement. Mais ce coup de fouet post-Eurobike a également vu des niveaux importants d’annulations de commandes européennes et mondiales à Taïwan. Les fabricants de vélos, de cadres et de composants qui ont obtenu des commandes jusqu’en 2024 et 2025 verront probablement ces chiffres diminuer d’ici la fin de l’année.

Le marché est maintenant confronté à des défis de stabilisation et doit avoir une meilleure vision pour prévoir des niveaux de croissance réalistes, ce qui est très difficile à suivre en raison de cet effet coup de fouet.

Des délais de livraison de retour à la normale pour l’industrie du cycle

La principale raison de ces problèmes de stocks ont trouvé leur origine dans les délais de livraison ou lead times, qui étaient multipliés par 3, 4 ou plus pour certains composants. Ces délais rendaient impossible l’adéquation des commandes aux besoins, qui doivent être anticipés parfois 2 ans à l’avance. À ces délais qui paralysaient l’industrie s’ajoutaient les différences de délais entre les différents composants d’un même vélo, ce qui constituait un véritable casse-tête pour la gestion des approvisionnements. Après un retour à la normale, les fournisseurs de composants asiatiques avaient réduit leur personnel suite à des demandes plus faibles, mais un sursaut dans les commandes des OEMs de dernière minute en décembre 2023 ont conduit à des tensions, qui devraient s’apaiser courant février 2024.

Les grands fournisseurs ont une mainmise totale sur l’industrie du cycle, imposant le rythme et obligeant les marques à gérer des stocks énormes. Ce rapport de force pourrait être inversé si des délais maximum de 3 mois étaient imposés, pour permettre aux marques d’adapter la production à la demande. Sur ce point, la standardisation est une partie de la réponse, et nous pouvons également penser aux défis de relocalisation.

Pour réduire les délais, la délocalisation peut rester la meilleure option. Et certains grands fabricants le savent, comme la marque italienne Bianchi, qui investit 40 millions de dollars pour fabriquer de la fibre de carbone en Italie. « Avec des délais de commande qui varient désormais entre 500 et 700 jours », a déclaré Fabrizio Scalzotto, directeur général de Bianchi, « c’est le bon moment pour rapatrier la production. »

délais livraison lead time vélo

Une année 2023 difficile pour l’industrie du cycle

Les prix des vélos ont baissé en raison des stocks élevés et des problèmes de trésorerie de très nombreux acteurs. Les marques essaient de réduire ces stocks et la promotion moyenne sur le prix d’une vélo est maintenant de 9,2 % (vs 2,8 % par le passé). Si le PDG de Pon, Janus Smalbraak, appelait en février à garder son calme dans sa déclaration « Ne pas paniquer! Je pense que les tendances à long terme sont incroyables pour le vélo », les signaux des mois suivants n’ont pas permis d’inverser la tendance. Les difficultés de nombreux acteurs comme le groupe Accell, Specialized, Stella, Signa sports ou d’autres ne sont pas passées inaperçues et on espère le retour de certains qui se voient offrir une seconde chance comme VanMoof, repris par Lavoie (McLaren).

Quelles perspectives pour l’industrie du vélo en 2024 ?

Ce début d’année est marqué par une nouvelle crise du transport maritime. Des attaques de rebelles Houthis en Mer Rouge ont incité 18 entreprises de logistique à éviter cette route par précaution, entrainant une hausse du prix des conteneurs (multiplié par 3). Le passage via le Cap de Bonne-Espérance nécessite 10 jours à 2 semaines de voyage supplémentaires, ce qui entraîne des taux de fret plus élevés et un impact négatif sur le commerce.Les problèmes de stocks persistent et la situation ne semblent pas s’améliorer à court-terme. Les marques recherchent de nouveaux canaux de distribution et tentent de déstocker par tous les moyens.

Si la période est difficile, il convient de rester confiant quant à l’attrait grandissant du vélo et à ses perspectives de développement inchangées à long-terme. Le plan vélo européen ainsi que les politiques nationales vont également dans ce sens. On espère une année 2025 sous le signe de la reprise.

Pour les marques, 2 stratégies s’opposent, soit jouer la sécurité sur cette période, soit miser dès maintenant sur l‘innovation pour différencier son offre et séduire plus de cyclistes. La deuxième stratégie sera payante, un avantage concurrentiel fort avec des produits à haute valeur ajoutée sur le marché lorsque les choses reviendront à la normale. Pour parier sur l’avenir, Velco peut être un grand soutien pour vous aider à créer votre prochain smartbike. Contactez-nous !